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Erosion de la biodiversité en agriculture : la thèse de Pascale Ioos

19/09/2023

La biodiversité en agriculture est un vaste sujet, qui touche de près à celui des semences. Dans sa thèse publiée en 2014, que vous pouvez télécharger ici, Pascale Ioos fait état de deux discours qui s’opposent : celui des grands semenciers, qui contrôlent aujourd’hui une grande partie de la biodiversité génétique de l’agriculture mondiale, et celui des maraîchers et de certains consommateurs avertis.

 

Selon les semenciers, la biodiversité est préservée

Les multinationales qui produisent aujourd’hui les graines de la plupart des agriculteurs sur la planète sont plutôt sereins quant à leur rôle dans la pérennité de la biodiversité génétique de nos cultures. Expliquant qu’ils produisent de plus en plus de graines chaque année, et qu’ils proposent dans leurs catalogues de plus en plus de variétés diversifiées, leur mission sur le papier, paraît remplie. 

D’ailleurs, si l’on en croit les initiatives comme la Réserve mondiale de semences du Svalbard (en Norvège), il apparaît que le monde – entendons par là les Etats et les entreprises les plus puissantes comme Microsoft par l’intermédiaire de la fondation Bill et Melinda Gates qui financent en partie la Réserve – se place plutôt dans une dynamique de préservation du patrimoine génétique du vivant végétal.

 

Pour manipuler le génome végétal, la science conserve les variétés de semence

Seulement cette initiative, si louable soit-elle dans l’idée, pose d’abord un problème logique et bio-logique. Car pour qu’une banque de données du vivant soit, justement, vivante, il faut semer régulièrement les graines, afin d’en produire des nouvelles, au potentiel de germination renouvelé. Une graine ne peut généralement pas vivre plus de 10 ans, même si les conditions sont idéales pour sa conservation. Chaque année, son potentiel de germination décroît. L’une des volontés pas vraiment dissimulée de ce projet d’envergure est de pouvoir un jour extraire les séquences d’ADN de nombreuses variétés conservées, afin de pouvoir les modeler selon l’envie et les besoins du consommateur et de l’agriculteur de demain.

 

Même si la science et le génie génétique évoluent, quelle est la probabilité que nous arrivions à extraire le patrimoine génétique d’une graine morte pour générer à nouveau du vivant ? Sinon, comment cultiver en Norvège des graines en provenance du monde entier, comme des variétés acclimatées au climat africain ou sud-américain ? Nous avons comme un doute. Enfin, certains spécialistes comme Pierre-Henri Gouyon s’expriment aussi sur la nécessité pour la biodiversité d’être maintenue dans une dynamique d’évolution. Figer un stock de graines dans le temps, c’est l’empêcher de s’adapter au changement climatique, aux nouvelles maladies ou aux nouveaux parasites de cultures. C’est finalement augmenter ses chances d’être inadapté le jour où son matériel génétique pourra être utilisé. Il est probable que cette nécessaire adaptation, même la bio-ingénierie avancée ne parviendra pas à la contrer.

 

Enfin, la conservation des semences en vue de la manipulation du génome végétal pour produire de nouvelles variétés pose un problème éthique plus profond. La semence paysanne, celle qui a été le travail de sélection d’agriculteurs protecteurs depuis des milliers d’années, est en train d’être récupérée et brevetée par des multinationales qui en feront commerce, et exploiteront ce patrimoine mondial pour leur propre profit. La question est posée : est-ce bien juste ?

 

La réalité du catalogue semencier : de plus en plus de F1, le non hybride se fait discret

Si le débat autour des OGM a surtout fait réagir les français au sujet de leur santé, le sujet de la biodiversité génétique du vivant a été un peu occulté. Pierre-Henri Gouyon, encore lui, en parlait pourtant en s’inquiétant de réserver à l’agrochimie et à ses grands semenciers le droit de créer la vie et de la propager jusqu’à rendre dépendants les travailleurs des champs.

 

À la Ferme de Cagnolle, nous recevons chaque année les catalogues de fournisseurs de semences. Le constat est limpide : les variétés F1, ces variétés modifiées, créées par l’homme pour avoir certaines qualités – souvent esthétiques et calibrées – représentent environ 80 à 85% des semences proposées. Les variétés non-hybrides, les variétés population, existent et résistent (encore heureux !), mais sont nettement moins nombreuses et le choix en termes de caractéristiques est alors bien plus restreint (couleur, taille, rendement…). Avec une tendance que nous constatons à la baisse, c’est à se demander si nous continuerons à acheter des graines d'ici à quelques années. C’est là que nous nous félicitons de conserver et préserver nos graines bio et semences paysannes, d’année et année !

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